Dans le cadre du procès du financement libyen du régime de Mouammar Kadhafi de la campagne présidentielle de 2007, le tribunal a rendu, le 25 septembre 2025, un jugement marquant. Nicolas Sarkozy, ancien président de la République, a été reconnu coupable d’association de malfaiteurs, les juges ayant retenu l’existence d’une entente organisée visant à préparer un pacte corruptif lié à des financements étrangers.
En revanche, il a été relaxé des chefs de corruption passive et de financement illégal de campagne, le tribunal estimant que les éléments apportés ne permettaient pas d’établir l’exécution du pacte allégué ni l’intention frauduleuse dans la tenue de ses comptes électoraux.
Le tribunal souligne la gravité exceptionnelle de l’association de malfaiteurs imputée à Nicolas Sarkozy. Cependant, le tribunal constate que les preuves apportées pour les autres chefs ne suffisent pas à emporter sa condamnation.
Sommaire
Les principaux protagonistes de l’affaire Kadhafi
Personnalités politiques françaises :
- Nicolas SARKOZY : Ancien ministre de l’Intérieur, candidat à la présidentielle de 2007, président de la République. Poursuivi pour corruption passive et association de malfaiteurs.
- Claude GUEANT : Directeur de cabinet de Nicolas Sarkozy au ministère de l’Intérieur. Poursuivi pour faux et usage de faux, blanchiment, corruption passive et association de malfaiteurs.
- Brice HORTEFEUX : Ministre délégué, proche de Sarkozy. Poursuivi pour complicité de financement illégal de campagne électorale et association de malfaiteurs.
- Eric WOERTH : Trésorier de la campagne de 2007. Poursuivi pour complicité de financement illégal de campagne électorale.
Intermédiaires et hommes d’affaires :
- Ziad TAKIEDDINE : Intermédiaire franco-libanais. À l’origine des révélations. Poursuivi pour complicité de corruption, trafic d’influence et détournement de fonds publics.
- Bashir SALEH : Directeur de cabinet de Kadhafi, directeur du fonds souverain libyen (LAP). Poursuivi pour détournement de fonds publics, corruption passive et blanchiment.
- Alexandre DJOUHRI : Homme d’affaires. Poursuivi pour corruption active, faux et usage de faux, complicité de détournement de fonds publics et blanchiment.
- Wahib NACER : Banquier à Genève, proche de la famille Bugshan. Poursuivi pour blanchiment de fraude fiscale, complicité de corruption et recel de détournement de fonds publics.
- Khalid Ali BUGSHAN et Ahmed Salem BUGSHAN : Hommes d’affaires saoudiens de la puissante famille Bugshan. Poursuivis pour blanchiment, complicité de corruption, recel de détournement de fonds publics et association de malfaiteurs.
- Sivajothi RAJENDRAM : Avocat en Malaisie. Poursuivi pour faux et usage de faux et blanchiment de corruption.
- Thierry GAUBERT et Edouard ULLMO (ancien cadre d’Airbus) sont également mis en cause dans des volets spécifiques.
Nicolas Sarkozy – le multirécidiviste
| Affaire de la Lybie et Kadhafi. | Condamné en première instance : cinq ans de prison ferme. |
| Affaire des écoutes – tentative de corruption d’un juge (Paul Bismuth). | Définitivement condamné : trois ans de prison, dont un an ferme. |
| Comptes de la campagne de 2012 (Bygmalion) et fausses factures. | Condamné à un an d’emprisonnement, dont six mois ferme en appel. |
Les volets du procès du financement libyen de Kadhafi et Nicolas Sarkozy
L’affaire du financement libyen de Kadhafi et Nicolas Sarkozy se décompose en plusieurs volets :
Le financement libyen de la campagne de 2007 :
- Il est reproché à Nicolas Sarkozy et son entourage d’avoir conclu un pacte corruptif avec le régime Kadhafi. En échange d’un financement de sa campagne électorale à hauteur de plusieurs dizaines de millions d’euros, Sarkozy aurait promis des contreparties une fois élu (contrats, soutien diplomatique).
- Les voyages officiels de Nicolas Sarkozy (6 oct. 2005) et Brice Hortefeux (21 déc. 2005) en Libye sont présentés comme des moments clés pour la conclusion de ce pacte.
- Ziad Takieddine affirme avoir servi d’intermédiaire et que Claude Guéant recevait Bashir Saleh au ministère de l’Intérieur pour lui communiquer les coordonnées bancaires.
Les 500 000 € versés à Claude Guéant (2008) :
- Claude Guéant a reçu un virement de 500 000 €, justifié par la vente fictive de deux tableaux à un cabinet d’avocats malaisien (Rajendram Associates).
- L’enquête montre que l’argent provient en réalité d’un compte de Khalid Bugshan en Arabie Saoudite et aurait servi à rembourser une somme due à Alexandre Djouhri, elle-même liée au financement occulte de la campagne. Ce montage est qualifié de blanchiment.
La vente surévaluée de la villa de Mougins :
- Le fonds souverain libyen (LAP) a acheté un ensemble immobilier à Mougins pour 10,14 millions d’euros, alors que sa valeur réelle était estimée à 1,8 million.
- Cette opération est analysée comme un détournement de fonds publics libyens orchestré par Bashir Saleh, permettant de masquer des versements de commissions et de blanchir de l’argent. Les frères Bugshan et Wahib Nacer sont impliqués dans les flux financiers opaques liés à cette transaction.
Le volet Airbus :
Des faits de corruption sont suspectés dans la vente de 12 Airbus à la compagnie libyenne Afriqiyah Airways. Édouard Ullmo, ancien cadre d’Airbus, a été mis en examen. Airbus a signé une convention judiciaire d’intérêt public (CJIP).
Le blanchiment de fraude fiscale (Wahib Nacer et Khalid Bugshan) :
Wahib Nacer et sa famille jouissaient d’un patrimoine immobilier important en France (notamment un appartement avenue Henri Martin) détenu en grande partie par des prête-noms de la famille Bugshan, sans le déclarer au fisc français, constituant une fraude à l’ISF.
Analyse des motifs retenus pour association de malfaiteurs de la condamnation de Nicolas Sarkozy

L’élément matériel
Le tribunal retient « l’existence d’une entente impliquant plusieurs protagonistes en vue d’obtenir des financements étrangers occultes pour la campagne présidentielle de 2007 » (p. 215).
Il précise que « les démarches entreprises, la mobilisation d’intermédiaires et l’organisation d’opérations de dissimulation démontrent la structuration d’un groupement poursuivant un but délictueux » (p. 216).
L’élément intentionnel
Concernant la volonté des participants, le jugement indique que « les actes ne sont pas le fruit du hasard, mais traduisent une volonté commune de recourir à des financements illicites en provenance de Libye » (p. 218).
À propos de Nicolas Sarkozy, il est relevé qu’il « ne pouvait ignorer la nature et l’origine des fonds sollicités, étant bénéficiaire direct de la manœuvre » (p. 219).
La qualification juridique
Les juges rappellent que « l’association de malfaiteurs est une infraction d’anticipation : il n’est pas nécessaire que les actes projetés aient été entièrement exécutés pour que l’entente soit punissable » (p. 221).
Ainsi, même si le pacte de corruption n’a pas produit tous ses effets, « la seule participation organisée à l’entreprise délictueuse suffit à caractériser l’infraction » (p. 222).
La gravité de l’infraction
Enfin, le tribunal souligne « la particulière gravité de cette association, par la nature des faits préparés, l’atteinte portée à la probité publique et le niveau de responsabilité des personnes impliquées » (p. 225).
La dimension internationale est également relevée : « le recours à des circuits étrangers, et en particulier libyens, accentue le caractère organisé et dangereux de l’entente » (p. 226).
Les peines prononcées – procès Sarkozy – Kadhafi
| Personne | Infractions retenues (selon le jugement) | Peine principale | Peines complémentaires |
| Sivajothi RAJENDRAM | Blanchiment international de corruption et trafic d’influence en bande organisée | 18 mois d’emprisonnement ferme | Amende de 100 000 € |
| Bashir SALEH | Corruption et association de malfaiteurs | 5 ans d’emprisonnement (mandat d’arrêt) | Amende 4 000 000 € – Interdiction gérer/administrer société 15 ans (exécution provisoire) |
| Khalid Ali BUGSHAN | Corruption, trafic d’influence, blanchiment | 3 ans d’emprisonnement | Amende 4 000 000 € ; interdiction gérer/administrer société 10 ans (exécution provisoire) ; mandat d’arrêt ; pas de restitution du cautionnement |
| Wahib NACER | Blanchiment et corruption | 4 ans d’emprisonnement | Amende de 2 millions d’euros |
| Alexandre DJOUHRI | Corruption, trafic d’influence, blanchiment | 6 ans d’emprisonnement ferme (mandat de dépôt) | Amende 3 000 000 € ; interdiction gérer/administrer société 15 ans (exécution provisoire) |
| Nicolas SARKOZY | Association de malfaiteurs | 5 ans d’emprisonnement (mandat de dépôt différé, exécution provisoire) | Amende 100 000 € ; interdiction fonction publique 5 ans ; privation de droit d’éligibilité 5 ans (exécution provisoire) |
| Brice HORTEFEUX | Association de malfaiteurs | 2 ans d’emprisonnement (détention à domicile sous surveillance électronique, exécution provisoire) | Amende 50 000 € ; interdiction fonction publique 5 ans ; privation de droit d’éligibilité 5 ans (exécution provisoire) |
| Claude GUEANT | Usage de faux, trafic d’influence, corruption passive, blanchiment et association de malfaiteurs | 6 ans d’emprisonnement (pas de mandat de dépôt en raison de son état de santé) | Amende 250 000 € ; pas d’interdictions complémentaires (âge et absence d’activité) |
Vidéo : Nicolas Sarkozy, une victime des juges gauchistes ?
FAQ sur le procès Sarkozy – financement libyen et par Mouammar Kadhafi
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